Catégorie : Max Gallo

Max Gallo, l’homme de l’âme. Partie 2. Le roman national comme religion révélée.

Après un premier article publié en novembre dernier, nous continuons l’analyse des travaux de Max Gallo1. L’académicien, qui affirme vouloir « ranimer le roman national français »2, propose surtout de célébrer les racines chrétiennes de la nation, de voir l’histoire de France comme une réalisation providentielle et la nationalité comme un acte de foi.

UN ROMAN NATIONAL RELIGIEUX ET PROVIDENTIEL

Jean Alaux, "Le Baptême de Clovis", 1825.
Jean Alaux, « Le Baptême de Clovis », 1825.

C’est sans doute par son lexique religieux que se distingue le roman national de Max Gallo, qu’il théorise dans L’Âme de la France (2007). Nous verrons d’ailleurs que les deux sont liés. Insérer dans le titre de son livre le terme « âme » (alors que d’autres auraient parlé « d’identité » ou de « racines ») et prétendre que la France en aurait une n’est pas anodin. Pas plus que ne l’est cette citation de l’ouvrage où nous avons mis en gras les termes relevant du champ lexical religieux, et spécifiquement du vocabulaire catholique.

Tel Napoléon Bonaparte, celui-ci sera l’incarnation de la nation, il lui procurera grandeur et gloire, confirmera qu’elle occupe avec lui une place singulière dans l’histoire des nations.
Il sera aussi un homme du sacrifice, gravissant le Golgotha, aimé, célébré, entrant au Panthéon de la nation après avoir été trahi par les judas qui l’auront vendu pour quelques deniers.
La légende napoléonienne sous-tend à son tour et renforce cette lecture « christique » de l’histoire nationale.
La France se veut une nation singulière, et il lui faut des héros qui expriment l’exception qu’elle représente.
Elle les attend, les sacre, s’en détourne, puis elle prie en célébrant leur culte.
« Fille aînée de l’Église », cette nation a gardé le souvenir des baptêmes et des sacres royaux, des rois thaumaturges.
La révolution laïque n’a changé que les apparences de cette posture3

Cette longue citation mérite une analyse complète. De prime abord, Max Gallo insiste sur un fait essentiel. Le fil conducteur de l’histoire de France semble être la « posture » religieuse qu’adoptent les différents régimes successifs, que ce soit les rois ou les révolutionnaires. Mais, en plus de permettre l’affirmation d’une continuité pluri-millénaire de la France, l’emploi de métaphores religieuses remplit, dans la rhétorique historique de Max Gallo d’autres fonctions.

L’HISTOIRE, UN ACTE DE FOI

Il s’agit tout d’abord de voir la construction du fait national non comme un long processus, mais comme un acte de foi constamment renouvelé au fil des siècles. Un positionnement qui se retrouve souvent chez d’autres historiens de garde comme Christophe Barbier (qui avait déjà ouvert largement les colonnes de L’Express à Dimitri Casali4) qui explique ainsi, dans un éditorial récent d’un numéro spécial consacré à l’histoire de France, que cette dernière (identifiée, comme chez Michelet et Gallo, à une personne), « ignore les origines des citoyens pour les faire siens s’ils adhèrent à la charte mystérieuse de la communauté nationale ». Outre l’emploi du mot « charte » (qui n’a rien d’anodin. Il fait sans doute une référence à la Restauration de 18145), on remarquera surtout l’emploie par Christophe Barbier du mot « mystère » (évoquant le mystère de la Trinité), qui évacue d’emblée toute explication rationnelle. Devenir français n’est pas un statut légal, mais un acte de foi, une adhésion à des valeurs et à des caractéristiques que l’éditorialiste se garde bien de décrire ou de définir.

Max Gallo va plus loin. Pour lui, l’adhésion se transforme en acte d’amour, presque en union charnelle, qui se serait répété au fil des millénaires, unifiant une terre (toujours la même) avec ses habitants successifs.

Elle [la France] suscite chez les peuples venus des immenses forêts […] le désir de s’enraciner en elle. […] On la façonne, on l’aime. Elle cesse de n’être qu’un territoire. » 6

Cet accouplement est nécessaire, selon lui, à l’existence même de la nation : « La France n’existe que par l’amour qu’on lui porte. »7. Cesser de croire en elle, cesser de voir dans son histoire une grande épopée et d’en raconter – comme le fait Max Gallo – le roman national, et ce sera le chaos et la « crise nationale » menant à la « déconstruction des institutions ». Une absence de foi caractéristique, évidemment, des adeptes de la « repentance ».

Ceux qui ne croient plus en l’avenir de la France ou qui refusent de s’y inscrire déconstruisent son histoire, n’en retiennent que les lâchetés, la face sombre. »8

Si le roman national relève de l’acte de foi, l’histoire critique serait donc, a contrario, un acte de haine et de destruction. C’est du moins ce qu’a récemment affirmé un autre académicien, Pierre Nora (qui fréquente également Max Gallo dans l’association Liberté pour l’Histoire9), qui voit dans la remise en cause de l’histoire nationale le fait d’ « historiens jeunes, et parfois moins jeunes » motivés « par un ressentiment à l’égard de la France. »10.

RÉHABILITER LE CATHOLICISME

Si la lente construction historique de la France et son ciment actuel sont des actes de foi, Max Gallo précise qu’il ne peut s’agit de n’importe laquelle. « La foi catholique est l’âme de la France » affirme ainsi en 2011 ce récent converti2.
On nous objectera que Max Gallo ne cesse de se réclamer de la laïcité. Certes, mais encore faut-il voir de quelle laïcité il est question. En effet, il lie cette notion (qui est une création récente) au baptême de Clovis.

La laïcité : elle naît avec le baptême de Clovis. Le roi est chrétien mais, quand vous lisez les lettres de Rémy, l’évêque de Reims, celui-ci dit à Clovis : tu as le glaive, moi, j’ai un autre pouvoir. Dès l’origine, il y a séparation entre le politique et le religieux12.

Max Gallo réussit, en trois lignes, un véritable tour de force en faisant découler la laïcité de l’Église catholique et du travail des rois de France. La séparation de l’Église et de l’État n’est donc plus le fruit d’une lutte qui fit rage tout au long du XIXe siècle, combat dans lequel Clovis servait de figure de ralliement à ceux qui s’opposaient à la sécularisation de la République13.
L’académicien joue en fait sur une confusion forte. Que ce soit au Ve siècle ou au XVe, la question n’était pas celle de la séparation, mais celle de la prééminence. Rois, évêques, cardinaux, papes, tous se sentaient membres d’un ensemble chrétien. Restait à savoir qui devait prendre la tête de cet ensemble. Les monarques, ou les prélats.

Voilà une réflexion sur laquelle Max Gallo n’a pas le temps de s’attarder. Car la catastrophe menace ! Tout comme la France en butte à une « crise identitaire », la foi catholique hexagonale est menacée (les deux événements semblent d’ailleurs liés pour l’académicien). Dans son Dictionnaire amoureux, il consacre ainsi tout un article à ce qu’il appelle la « déchristianisation ». Ce terme fait référence aux campagnes de déchristianisation de la Révolution française, sous la Convention, période honnie par les historiens de garde et par Gallo lui-même14 Ce n’est donc pas un hasard si, pour illustrer cet article, l’artiste Alain Bouldouyre a choisi de représenter des prêtres envoyés à la guillotine. L’idée est, évidemment, d’associer la déchristianisation à une image sanglante et catastrophique.

Image illustrant l'article "déchristianisation" du "Dictionnaire amoureux de l'Histoire de France" (2011), p. 103. La sécularisation de la société française est associée à un processus sanglant.
Image illustrant l’article « déchristianisation » du « Dictionnaire amoureux de l’Histoire de France » (2011), p. 103. La sécularisation de la société française est associée à un processus sanglant.

Mais le terme de déchristianisation induit surtout que seul le christianisme (et plus particulièrement le catholicisme), en France, serait en perte de vitesse. Cette impression est confirmée si on lit de près l’article, notamment cette citation :

Quel changement, quelle révolution silencieuse, au moment où l’islam réclame la place qui lui est due dans le concert des cultes puisqu’il est désormais la deuxième religion de France.
Les jeux sont-ils faits ? Le catholicisme, longtemps horizon de la civilisation française, vit-il ici, sur la terre de Saint Louis et de sainte Jeanne d’Arc, son crépuscule ? La France, objet d’amour parce qu’elle était la fille aînée de l’Église, ne va-t-elle pas se fragmenter en communautés ? Et de la France de la diversité, tant vantée, ne glissera-t-on pas à une France divisée ? Où l’on n’aimera plus que son morceau de terre ? Devra-t-on dire adieu à « une certaine idée de la France » ?15

La phrase centrale (soulignée pas nos soins), appelle des commentaires. En effet, Max Gallo justifie la nécessité du ciment de la foi catholique par un argument historique bien connu. Le christianisme serait un élément important, essentiel, à la construction de la France, source d’amour à la fois pour Dieu et pour le pays. C’est tout l’objet de la première partie de l’article « Déchristianisation », où l’académicien égrène une longue litanie d’images sans cesse répétée (Clovis, les cathédrales, les pèlerinages). Cette union naturelle entre un pays et une foi, donc un Dieu, garant de son exceptionnalité, a été rompue. L’académicien en cherche les causes. Figurent en tête de la liste des accusés la Révolution, bien sûr, mais surtout des bouleversements plus récents. Quels sont-ils ? La repentance, dont nous avons déjà parlé dans le précédent article, mais également l’islam. Preuve en est que, pour l’académicien :

On craint l’action des minorités musulmanes radicales. Or, l’islam est devenu la deuxième religion de France. Les fidèles, pour l’heure, acceptent les lois laïques. Mais la minorité intégriste les remettra-t-elle en cause, entraînant la majorité des fidèles ?16

"Mon travail, c'est de ranimer le roman national français." M. Gallo, 14 juillet 2011.
« La foi catholique est l’âme de la France. » M. Gallo, 14 juillet 2011.

Aussi, si l’influence et la présence du catholicisme sont vues, par Max Gallo, comme historiquement positives, celles des musulmans (les seules, au passage, a être assimilés à l’intégrisme) sont perçues comme un problème et un danger pour l’avenir. La création du Conseil français du culte musulman est ainsi la « preuve de l’émiettement désirée de l’identité française. »17. « Désirée », car selon l’académicien, il y aurait comme une volonté délibérée de détruire l’identité nationale, une volonté toujours là, comme un diable conjuré contre la nation, tapie, dans l’ombre, prêt à frapper. Ce point de vue, Max Gallo l’exprime clairement dans un livre d’entretiens récent. Dressant les dix caractéristiques qui fondent l’identité de la France, il explique que la dernière serait :

La permanence des forces de désagrégation qui menacent l’unité fragile de ce pays. Nous sommes toujours menacés d’éclatement et aujourd’hui peut-être plus que jamais du fait de la progression du communautarisme18.

Cette menace constante justifierait, évidemment, la nécessité permanente d’en appeler à un sauveur, instrument de la résurrection nationale.

LA FRANCE, OUTIL DE LA PROVIDENCE

Les références constantes à un lexique ou à la métaphore religieuse sont aussi un moyen d’exprimer une exceptionnalité de la France. Comme l’a affirmé Max Gallo lui-même, le martyre de plusieurs de ses grands hommes permet au roman national de prendre des allures bibliques. Le sacrifice est comparable à celui du Christ et se veut avoir une portée mondiale, comme c’est le cas avec Vercingétorix :

Mais le sang répandu, les violences subies, les martyres endurés, ne sont jamais oubliés. Ils irriguent la longue mémoire d’un lieu, d’un territoire. […] Et l’âme s’y abreuve, découvrant ces dix mois de résistance, ce chef gaulois, Vercingétorix, qui devient un héros emblématique.
L’âme prend aussi conscience que c’est en Gaule que s’est joué le sort de l’Occident – l’histoire mondiale d’alors.19

Comme le montre la dernière phrase, le destin de la France est d’autant plus exceptionnel qu’en dehors de l’Occident (qui résume à lui seul l’histoire du monde), il n’y a pas d’histoire. Des propos européano centrés qui annoncent en partie le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy 20
Mais c’est surtout lorsqu’il raconte la mort de de Louis IX (saint Louis) à Tunis en 1270, en pleine croisade, que Max Gallo est le plus explicite quant à la destinée manifeste de la France :

Le roi de France n’est pas seulement saint, mais martyr.
Comment certains n’imagineraient-ils pas, après un tel apogée, que la France est promise à un destin exceptionnel, quelle est une nation sainte ?
« J’ai d’instinct l’impression que la Providence l’a créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires » écrira de Gaulle21.

Providence, le mot est lâché. Car la France doit à des forces qui dépassent l’entendement d’être née sous une bonne étoile. D’emblée, sa terre elle-même est décrite comme supérieure aux autres :

Ses paysages sont divers, ses fleuves paisibles, sa terre fertile, le climat moins brutal qu’ailleurs.6

Mais c’est surtout par son exceptionnelle résilience que la France développe au long de son histoire. On le sait, la défaite, dans les diverses versions du roman national, à toujours été fondatrice, car elle permettait de montrer la capacité de la France à renaître23. Cette résurrection ne peut à chaque fois se faire qu’à travers un homme providentiel qui incarne le pays et dont Max Gallo aime faire le panégyrique ou la promotion. La citation de De Gaulle, tirée des Mémoires de guerre, parle évidemment de la Débâcle pour mieux faire ressortir le besoin d’un grand homme incarnant la France. Dans le contexte de la rédaction de L’Âme de la France (la campagne de l’élection présidentielle de 2007), cette vision, combinant catastrophisme et appel à un sauveur, n’a évidemment rien d’innocent. Elle a pour but d’annoncer que le choix de l’académicien se portera vers Nicolas Sarkozy, présenté comme le seul homme capable de faire face à la crise, notamment la crise d’identité qui menace son âme24.
Lorsque la Providence ne peut compter sur le grand homme, c’est parfois la terre elle-même qui, par son seul pouvoir, réussit à assurer le destin national.

Restent les Francs qui […] sont pris par cette terre qui les conquiert autant qu’ils croient la posséder25.

Nous nous unissons aux Romains. Dès lors, nous sommes vainqueurs, puisque nous ne sommes plus seulement gaulois, mais gallo-romains !26

LES RACINES DE MAX GALLO

L’idée d’une exceptionnalité providentielle de la France, destinée à éclairer le monde (que l’on retrouve chez Jean-François Kahn, pour qui les Gaulois seraient les inventeurs des droits de l’homme), n’est pas une invention de Max Gallo, loin s’en faut. Elle est pourtant datée.

Il faut d’abord distinguer les rois de France de la France. C’est en effet à partir du XIIIe siècle, et notamment sous le règne de Philippe le Bel, que les monarques capétiens se sont présentés comme des rois très chrétiens, n’hésitant pas à pontificaliser la fonction monarchique, au point de contester au pape certaines de ses prérogatives sur le territoire du royaume 27. Par contre, l’expression « France, fille aînée de l’église » date quant à elle du XIXe siècle et se déploie dans un tout autre cadre. Il s’agit, pour une partie de l’épiscopat, de contrer l’idéologie révolutionnaire et de réaffirmer la place de l’Église dans une société qui se sécularisait peu à peu. L’un des promoteurs les plus infatigables de cette expression, le cardinal Langénieux (1824-1905. Il fut également archevêque de Reims, ville du sacre), ira jusqu’à affirmer au moment de la célébration du XIVe centenaire du baptême de Clovis que :

Quand Dieu voulut, après l’ère si douloureusement féconde des persécutions, donner à son Église une constitution sociale plus stable et l’émanciper de la tutelle gênante et précaire de l’Empire romain, il créa la France pour qu’elle fût dans le monde l’instrument de sa Providence28

L’idée de cette exceptionnalité providentielle de la France sera sécularisée par une partie des républicains, tel Michelet, qui écrivait :

De la déduction du passé, découlera pour vous l’avenir, la mission de la France ; elle vous apparaîtra en pleine lumière, vous croirez, et vous aimerez à croire ; la foi n’est rien autre chose29.

Michelet n’est pas un cas isolé. Depuis l’article de Maurice Crubelier « De l’histoire sainte à l’histoire de France », on commence à entrevoir aussi ce que l’enseignement de l’histoire laïque, qui s’est peu à peu imposé durant la seconde moitié du XIXe siècle, doit à l’enseignement religieux et plus particulièrement à l’histoire sainte enseignée dans les écoles , notamment en ce qui concerne la méthodologie30, 114, 2007.]. La France providentielle deviendra celle des droits de l’homme qu’il fallait répandre sur le monde et dans les colonies pour les « civiliser », quitte à en dévoyer les principes. Comme l’a écrit M. Crubelier : « le progrès a remplacé l’action providentielle. Le Progrès est le nouveau dogme ; la France en a été le champion. D’un peuple saint, on est passé à un autre peuple saint. »31

CONCLUSION : MAX GALLO, LE PREMIER DES « HISTORIENS DE GARDE »

En écrivant le livre Les Historiens de garde, il nous avait semblé que Max Gallo n’appliquait pas les mêmes méthodes médiatiques et publicitaires qui sont à l’origine du succès d’auteurs comme Stéphane Bern ou Lorànt Deutsch. De plus, l’académicien, de prime abord, ne produisait que des romans historiques, et pas des livres ayant vocation à représenter le passé de manière « authentique » pour reprendre un propos de Lorànt Deutsch. Aussi l’avions-nous exclu de notre analyse. Ce fut une erreur. Non seulement Max Gallo bénéficie d’une couverture médiatique importante, mais toute son œuvre procède de la même ambiguïté fondatrice que celle qui préside aux travaux des historiens de garde : la confusion, volontairement entretenue, entre Histoire et fiction. Une pratique appliquée depuis par Basile de Koch et son « vrai-faux manuel d’histoire », Lorànt Deutsch ou par Philippe de Villiers, dernier venu parmi les historiens de garde, qui expliquait récemment à propos de sa dernière biographie de Louis IX que : « Le roman de saint Louis n’est pas un roman, c’est la vie de saint Louis qui est un roman. »32

Cette confusion n’a rien de gratuite. Sous la plume de l’académicien, l’Histoire (re)devient une véritable religion révélée de la patrie, au service du pouvoir en place. Elle ne s’adresse pas à des individus critiques, mais, au mieux, à des consommateurs d’images d’Épinal, et, au pire, à des thuriféraires de l’ordre botté et rasé. Une histoire contre laquelle, en 1919, déjà, Lucien Febvre mettait en garde :

L’histoire qui sert, c’est une histoire serve. Professeurs de l’Université Française de Strasbourg, nous ne sommes point les missionnaires débottés d’un Évangile national officiel, si beau, si grand, si bien intentionné qu’il puisse paraître. […] La vérité, nous ne l’amenons point, captive, dans nos bagages. Nous la cherchons. Nous la chercherons jusqu’à notre dernier jour. Nous dresserons à la chercher après nous, avec la même inquiétude sacrée, ceux qui viendront se mettre à notre école33.

William Blanc

  1. Nous remercions Nathalie Dalla Corte pour sa traduction et sa patience.
  2. Le Point, 14 juillet 2011.
  3. L’âme de la France, p. 354.
  4. Voir Les Historiens de garde, p. 219
  5. Il est intéressant de remarquer que c’est sous la Restauration qu’ont été écrites les premières esquisses de roman national. Voir à ce titre S. Venayre, Les Origines de la France, Seuil, 2013, p. 26-33.
  6. Dictionnaire amoureux, p. 13.
  7. Ibid.
  8. L’Âme de la France, p. 590.
  9. Voir M. Gallo, Histoires particulières, Paris, 2009, p. 91.
  10. Voir à ce sujet l’article de Vincent Capedepuy « Le déni du Monde », aggiornamento.hypotheses.org, 17 juin 2013.
  11. Le Point, 14 juillet 2011.
  12. Max Gallo, Histoires particulières, p. 84. Texte en gras souligné par nos soins.
  13. Voir C. Amalvi, « Le baptême de Clovis : heurs et malheurs d’un mythe fondateur de la France contemporaine, 1814-1914 », Bibliothèque de l’école des chartes, 147, 1989, p. 583-610.
  14. « La Bastille tombée, la violence cruelle et barbare, lourde de ressentiment, se déchaîne. Elle s’est accumulée depuis des siècles. (…) Et le désordre s’installe. Plus personne n’est capable de rétablir l’ordre, de faire rentre le fleuve dans son lit. » Dictionnaire amoureux, p. 402. Cette image négative rentre-t-elle en contradiction avec la citation (bien plus positive) tirée de L’Âme de la France selon laquelle « La Révolution, la République, sont l’assomption de la nation. » (p. 327) ? Pas si l’on comprend que, pour Max Gallo, la Révolution positive (dont il est question ici) est incarnée par Napoléon.
  15. Dictionnaire amoureux, p. 104. Voir également « Interview de Max Gallo », Le Figaro Magazine, 16 avril 2011.
  16. Dictionnaire amoureux, p. 271.
  17. L’âme de la France, p. 586.
  18. M. Gallo, Histoires particulières, p. 85.
  19. L’âme de la France, p. 47-48. Notons encore une fois le jeu des métaphores christiques : « le sang répandu » dont l’âme « s’abreuve ».
  20. « Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. Le paysan africain, qui depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès. » Discours prononcé le 27 juillet 2007 à l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar (Sénégal). On remarquera que ce genre de propos semble être l’apanage de ceux qui défendent une vision nationale de l’histoire. Ainsi, Pierre Nora, en introduction du premier tome des Lieux de mémoire (certes composé au début des années 1980), explique ainsi qu’ « à la périphérie, l’indépendance des nouvelles nations a entraîné dans l’historicité les sociétés déjà réveillées par le viol colonial de leur sommeil ethnologique. » P. Nora, « Entre Mémoire et Histoire. La problématique des Lieux » dans Les Lieux de mémoires, Gallimard, 1997 (1ère édition 1984), p. 23. Les connaisseurs de l’histoire africaine apprécieront l’allusion au « sommeil ethnologique ».
  21. L’Âme de la France, p. 94. Max Gallo ne précise évidemment pas d’où est tirée cette phrase (aucune source des citations n’est proprement indiquée). Il s’agit de Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre, Tome I, L’Appel, p. 1. Rappelons que, sur la base de la Croix de Lorraine de Colombey-les-Deux-Églises est inscrite la phrase suivante : « Il y a un pacte plusieurs fois séculaire entre la grandeur de la France et la liberté dans le monde. ». Voir Maurice Agulhon, De Gaulle. Histoire, symbole, mythe, Hachette, 2001 (1ère édition 2000), p. 12.
  22. Dictionnaire amoureux, p. 13.
  23. Le mythe de la défaite fondatrice a été largement utilisé par divers régimes, que ce soit en 1870 ou après 1940 par Vichy qui usa et abusa de l’image d’Alésia. Voir à ce sujet l’article sur le blog de J-P Demoule, « Alésia ou la défaite fondatrice », jeanpauldemoule.com, 5 avril 2012. Sur la notion de défaite fondatrice, voir P. Joutard, Histoire et mémoires, conflits et alliance, La Découverte, 2013, p. 102-107.
  24. On notera qu’un autre historien de garde, Dimitri Casali, affirme lui aussi sa foi dans la venue d’un nouvel homme providentiel pour sauver la France de la crise. Voir à ce titre cet article, daté du 19 septembre 2013.
  25. L’âme de la France, p. 57
  26. Dictionnaire amoureux… p. 26
  27. Voir à ce titre le fascinant article Julien Théry, « Une hérésie d’État. Philippe le Bel, le procès des « perfides templiers » et la pontificalisation de la royauté française », Médiévales, 60, printemps 2011.
  28. Voir, à ce sujet, S. Venayre, op. cit., p. 67-84.
  29. J. Michelet, Le Peuple, Paris, 1974 (1ère éd. 1846), p. 238.
  30. Voir A. Bruter, « Un laboratoire de la pédagogie de l’histoire. L’histoire sainte à l’école primaire (1833-1882) », Histoire de l’éducation [En ligne
  31. M. Crubellier, « De l’histoire sainte à l’histoire de France », Les Cahiers aubois d’histoire de l’éducation, n° spécial 10-a : Colloque 1986. Les manuels scolaires, 1988, pp. 89-104.
  32. Nouvelle de France, le 10 décembre 2012.
  33. L. Febvre, « L’Histoire dans un monde en ruine », Revue de Synthèse Historique, t. XXX, 1920, Leçon d’ouverture, faculté des lettres de Strasbourg, 4 décembre 1919. Le texte complet est disponible sur le site fr.wikisource.org, consulté le 3 mars 2014.

Max Gallo, l’homme de l’âme. Partie 1. Méthode, programme, modèles.

C’est à un oublié du livre Les Historiens de garde qu’il faut rendre justice1. Auteur de nombreux romans historiques (qu’il nomme des « romans-histoire ») et biographies romancés (deux tétralogies consacrées à Napoléon – 1997 – et à De Gaulle – 1998 -), Max Gallo va, surtout à partir de 2006, entamer une véritable production historique en sortant du roman et en produisant deux ouvrages : L’Âme de la France, sous-titré Une histoire de la Nation des origines à nos jours (2007) et un Dictionnaire amoureux de l’histoire de France (2011), auxquels il faut ajouter un livre d’entretiens avec Paul-François Paoli, Histoires particulières (2009) où il mêle son propre storytelling à sa vision de l’histoire de France. L’Âme de la France nous semble être un ouvrage essentiel. Précédant de quelques années la vague, incessante depuis, de livres écrits par des historiens de garde2, il les annonce en grande partie. Il est à ce titre un livre-programme dans tous les sens du terme, un programme que l’académicien précisera à la sortie de son Dictionnaire amoureux : « Mon travail, c’est de ranimer le roman national français. » 3. Certes. Mais de quel roman national parle-t-on ? Et surtout, sur quoi l’appuie-t-il ?

UNE HISTOIRE STROMBOSCOPE

Force est de constater que les travaux de Max Gallo ressemblent plus à une longue litanie de maximes et d’aphorismes réunis en paragraphes très courts qu’à un texte d’analyse. Ses conclusions, qu’il lance à la cantonade, ne s’appuient souvent sur rien.

Héloise et Abélard vont au bout de l’amour courtois, emportés par leur passion amoureuse.
Ils ne sont pas enfermés dans et par leur amour.
Ils sont dans la société.
[…]
Ainsi, dans ce XIIe siècle, commencent à surgir les traits qui caractériseront la France. La femme, l’amour y jouent un rôle majeur.
En 1180, quelques années après la mort d’Héloïse, Philippe Auguste devient roi de France. Avec lui, à la bataille de Bouvines, le dimanche 27 juillet 1214, la « nation » française s’affirme face aux féodaux, à l’empereur germanique, au roi d’Angleterre.
Les étudiants de Paris, qui avaient aimé Abélard, rêvé d’Héloïse, dansent et chantent plusieurs jours pour célébrer le dimanche de Bouvines.
La France prend âme et corps4.

On le voit, la prose stroboscopique de l’académicien mêle, dans le désordre, des phrases dépourvues de sens (« Ils sont dans la société »), lie personnages et événements qui n’ont pas grand chose à voir entre eux (Héloïse et Abélard et la victoire de Bouvines), et jette des analyses toutes faites (transformer Héloïse en exemple des libertés féminines qui caractériseraient la France est, au mieux, une mauvaise blague5). Une manière d’écrire qui empêche tout recul, tout analyse, qui ne laisse pas le lecteur « respirer » mais, au contraire, l’entraîne dans un sorte de scansion patriotique, que l’académicien appuie sur des citations, généralement de grands hommes, placées le plus souvent dans le désordre le plus affolant, et évidemment, sans aucune référence bibliographique. Ainsi, pour illustrer des exemple d’amour de la France, place-t-il, juste après des citations de Simone Weil, Charles de Gaulle et de Louis Aragon, un extrait de La Chanson de Roland (qui, selon lui, « raconte l’histoire de Roland »6). Pour lui, le simple fait que l’expression « douce France » apparaisse plusieurs fois dans ce texte serait la preuve de l’existence d’un sentiment patriotique dès le XIe siècle7.

Le travail de l’académicien n’étant pas de faire de l’histoire, donc d’analyser le texte, mais de « promouvoir le roman national », il lui aura certainement échappé que le terme « France », au XIe siècle, ne désigne pas la même chose qu’aujourd’hui et, surtout, que le fait d’employer l’adjectif « doux » pour décrire une région ne veut pas dire que son auteur éprouve un sentiment d’attachement patriotique à son égard. Mais passons…

L’iconographie semble au contraire très sobre. Ainsi, les illustrations intérieures du Dictionnaire amoureux... (nous parlerons des couvertures de L’âme de la France plus tard) sont en noir et blanc et couvrent peu d’espace. Mais force est de constater que le choix (de l’auteur ? de l’éditeur ? Des deux ?) s’est porté, non pas sur une imagerie récente pouvant renouveler les représentations des sujets traités, mais plutôt sur des oeuvres très datées, plongeant le lecteur dans une culture visuelle reconnue et rassurante. Pour illustrer l’article « Alésia » du Dictionnaire amoureux…, le dessinateur Alain Bouldouyre s’est ainsi contenté (p. 24) de recopier le Vercingétorix jette ses armes aux pieds de Jules César (1899) de Lionel Royer, peintre d’histoire pompier et qui propos une vision pour le moins héroïque de l’événement, bien loin de ce qu’il a pu être dans la réalité8.

M. Gallo, "Dictionnaire amoureux...", p. 24. Illustration d'A. Bouldouyre. // "Vercingétorix jette ses armes aux pieds de César", par Lionel Royer (1899).
M. Gallo, Dictionnaire amoureux…, p. 24. Illustration d’A. Bouldouyre. // « Vercingétorix jette ses armes aux pieds de César », par Lionel Royer (1899).

Le même recyclage iconographique s’opère pour l’image illustrant la bataille de Bouvines9, qui ne fait que reprendre la peinture d’Horace Vernet (1789-1863) sur le sujet.

Grands textes et images d’Épinal constituent les moyens du programme de Max Gallo. Voyons maintenant son contenu.

UN LIVRE-PROGRAMME

Pour l’académicien, le terme de programme prend plusieurs sens. Évidemment, il critique, comme les autres historiens de garde, les programmes scolaires d’histoire et réaffirme que l’objet principal de cette matière doit être « l’enracinement. »10 fondé sur une « chronologie » (comprendre des grandes dates glorieuses) :

Les repères chronologiques se sont dissous dans un magma où a sombré aussi l’histoire de France. Et on n’a pas donné pour autant « le goût » de l’histoire mondiale, sociale ou économique. Reste l’ignorance11.

Mais cette critique se fait jour dans le Dictionnaire amoureux…, en 2011, après le début de la polémique lancée, notamment, par Dimitri Casali12. Avec L’âme de la France, c’est surtout de programme électoral qu’il est question. Dans ce livre écrit en 2006, mais publié au début de 2007 en pleine campagne pour la présidentielle, Max Gallo fait un constat sans appel et dresse le portrait d’un pays au bord du gouffre.

Or, pour la France, le XXIe siècle tel qu’il commence, sera le temps des troubles. La nation est ankylosée par une crise profonde. Elle doute de son identité, et donc de son avenir.
Depuis qu’on ne se soucie plus de l’âme de la France, les problèmes quotidiens des Français se sont aggravés13.

Le doute identitaire, voilà l’adversaire de Max Gallo14. Le symptôme de ce mal, selon lui, c’est le déni d’histoire, alors qu’elle seule peut créer de l’identité et de l’avenir. Les causes en sont claires :  l’oubli et de la repentance.

Les présidents qui se sont succédés depuis trente ans […] ont préféré parler des Français, leurs électeurs [plutôt que de l’âme de la France]… Adieu la France ont-ils lancé avec plus ou moins de nostalgie. Le premier jugeait que la France […] devait se fondre dans la communauté européenne15. Le deuxième concédait qu’elle était encore notre patrie, mais que son avenir s’appelait l’Europe. Le troisième l’invitait à la repentance perpétuelle. […] On leur a dit [aux Français] depuis trois décennies : Oublions les rêves de grandeur ! […] Effaçons notre histoire glorieuse de nos mémoires ! Elle est criminelle16.

La solution consiste alors, pour Max Gallo, à combattre ces fléaux en redécouvrant la véritable âme de la France ainsi que l’aurait dévoilé l’Histoire.

On ne peut bâtir l’avenir d’une nation sans assumer toute son histoire. Elle s’est élaborée touche après touche […] et c’est ainsi, d’événement en événement, de périodes sombres en moment éclatants, que s’est constitué l’âme de la France17.

Tout le projet historique de Max Gallo (que l’on retrouve déjà chez les historiens du XIXe siècle18) est résumé dans ces quelques lignes. Faire de l’Histoire, c’est révéler l’âme de la France et (re)créer de l’identité, une identité menacée par les particularismes (et certains, comme nous le verrons, bien plus que d’autres) et la repentance. Aussi se rallie-t-il le 13 mars 2007 à Nicolas Sarkozy, après que celui-ci a annoncé qu’il appuierait, en cas de victoire, la création d’un ministère de l’Identité nationale.

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L’alors ministre de l’Intérieur correspond en effet au portrait du bon gouvernant (français) que dresse l’académicien, un homme pour qui « le destin de la France, de son identité, de ses intérêts nationaux » sont les « préoccupations premières »17.

Dans cette optique, le rôle de Max Gallo est double. Il est tout d’abord, à l’image de Lavisse, un « instituteur national », mais également un conseiller du prince. On ne peut nier l’influence qu’il a eue sur certains projets historiques du quinquennat Sarkozy. Ainsi, le projet de « maison de l’histoire de France », en réemployant notamment l’expression d’âme de la France, est-il largement inspiré par la prose de l’académicien, comme Nicolas Offenstadt l’avait déjà pointé en 200920. Dans la bibliographie du projet (disponible à cette adresse) écrit par le conservateur du patrimoine Hervé Lemoine, Max Gallo est l’auteur dont les ouvrages apparaissent le plus souvent. Sont ainsi placés, au milieu de plusieurs dizaines d’ouvrages d’historiens reconnus, les essais de Max Gallo (Fiers d’être français, 2006, et L’Âme de la France, 2007.), mais aussi son texte sur La Nuit des longs couteaux (publié en 1970 et dont on ne sait pas trop ce qu’il vient faire là). Son nom est de ceux qui apparaissent le plus dans le corps du texte. Ses récriminations sur le fait que le gouvernement de 2005 a refusé de célébrer le bicentenaire de la bataille d’Austerlitz21 sont ainsi reprises dans un long paragraphe et avec les mêmes termes. Ses réflexions sont enfin citées en exemple afin de définir le socle de connaissances qui seront proposées par le musée.

Alors que, depuis des décennies, les particularismes et les individualités, parfois les communautarismes, tous « les pluriels de l’histoire », semblent avoir donné l’impression que la France n’avait pas « une histoire singulière », donc pas d’âme, au prétexte qu’il n’y aurait pas « une France », mais des « France », tout comme il n’y aurait plus une langue de France, mais des « langues » de France, le centre chercherait à mettre en lumière les éléments constitutifs et singuliers, dans les deux sens du terme, de cette âme22.

Pareillement, force est de constater que Nicolas Sarkozy (qui sera présent lors de la cérémonie de réception de Max Gallo à l’Académie23) et Max Gallo ont tous deux la même manière d’écrire et de raconter l’histoire. Le Dictionnaire amoureux24 reprend ainsi le mélange de références et de grands noms, amenés pêle-mêle sans autre logique que d’abasourdir l’auditeur ou le lecteur, qui avait tant servi au succès du candidat de l’UMP en 200725. Mais derrière cette confusion savamment entretenue, Max Gallo et l’ancien président ont un adversaire en commun : la repentance.

LA REPENTANCE : L’ENNEMI

Au milieu de cette verve rhétorique, il est aisé de distinguer des thèmes phares. Nous l’avons vu, si la France est en crise, c’est que la faute en revient principalement à la repentance, qui serait source de désunion. Et Max Gallo à une idée bien précise de qui blâmer pour cela. Reprenons la citation des p. 21 et 22 de L’âme de la France où l’académicien énumère les fautes des présidents précédents :

Adieu la France ont-ils lancé avec plus ou moins de nostalgie. le premier jugeait que la France […] devait se fondre dans la Communauté européenne. Le deuxième concédait qu’elle était encore notre patrie, mais que son avenir s’appelait l’Europe. Le troisième l’invitait à la repentance perpétuelle.

Ce troisième président est évidemment Jacques Chirac. L’académicien l’affirme clairement à la fin du même ouvrage :

Car durant ces douze années de la présidence Chirac, ce n’est plus seulement le sens de l’avenir de la France qui est en question, mais aussi son histoire26.

"Mon travail, c'est de ranimer le roman national français." M. Gallo, 14 juillet 2011.
« Mon travail, c’est de ranimer le roman national français. » M. Gallo, 14 juillet 2011.

Le premier mandat de Jacques Chirac a été le théâtre de deux événements que fustige Max Gallo : le discours du 16 juillet 1995 par lequel Jacques Chirac reconnaît les responsabilités de l’Etat français dans la Shoah27 et la loi Taubira du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance des traites et des esclavages comme crime contre l’humanité. Conséquence de ce mouvement de « repentance »28, il existerait maintenant, selon Max Gallo, une « nouvelle histoire officielle […] imposant aux historiens ces nouvelles vérités qu’on ne peut discuter sous peine de procès. » (p. 591). On retrouve là la rhétorique d’un Jean Sévillia29, qui, comme celle de Gallo, inspirera l’ensemble des historiens de garde qui ne cessent de parler d’une histoire « politiquement correcte ». Pourtant, les historiens travaillant sur la colonisation sont libres de le faire dans le sens qui leur convient. En fait de « procès », l’un des rares « historiens » a en avoir été victime est Max Gallo lui-même, attaqué par le CM98 sans succès pour avoir déclaré en 2004 à propos du rétablissement de l’esclavage par Bonaparte : « Cette tache, car c’est une tache réelle, est-ce que c’est un crime contre l’humanité ? Peut-être, je ne sais pas. »30

Sans nous prononcer sur le fond, la tactique de victimisation employée par Max Gallo annonce celle des historiens de garde, qui se présentent constamment comme des francs-tireurs menacés par l’institution. Dans l’affaire qui l’oppose au CM98, rien n’est plus faux. Max Gallo, académicien, représente bel et bien l’institution et l’homme de pouvoir dont le poids médiatique dépasse largement celle du CM98. Cette association, d’ailleurs, ne représente en rien une « histoire officielle », pas plus qu’il n’existe une pensée unique au sein de l’Éducation nationale quant à l’esclavage ou à la colonisation qui verrait tout en noir. Ce serait plutôt Max Gallo lui-même qui, concernant l’histoire colonial, serait d’un manichéisme impressionnant.

Ainsi, dans L’Âme de la France, la guerre d’Algérie est-elle imputé au seul FLN.

On commence déjà à égorger en Algérie. Un Front de libération nationale (FLN) s’est constitué. En août 1955, dans le Constantinois, il multiplie les attentats, les assassinats31

Rien n’est dit des conditions qui expliquent le soulèvement du FLN. La colonisation est évacuée en quelques lignes. La date de Sétif est évoquée32, sans que l’auteur n’explique ce qui s’est joué là-bas. le terme de massacre n’est d’ailleurs pas prononcé. Ce serait sans doute faire preuve de trop de « repentance ». Dans le Dictionnaire amoureux…, un article est certes consacré au 17 octobre 1961. Si Max Gallo ne tait pas l’horreur du massacre (il était, à l’époque, de gauche et opposé à la guerre d’Algérie), il explique l’événement par une chaîne causale pour le moins étrange. Ainsi, les policiers seraient mus par un « désir de vengeance » (face auquel Maurice Papon se serait laissé emporter) provoqué par les massacres du FLN dont le seul but serait « qu’un fossé rempli de sang sépare Algériens et métropolitains, pour que chaque Algérien soit contraint de s’engager. »33. N’en déplaise à l’académicien, la situation explosive de Paris ne s’explique pas par la seule brutalité (réelle) du FLN, mais aussi par celle de la Préfecture, usant notamment des supplétifs de la Force de police auxiliaire. Les morts, des deux côtés, mais aussi les actes de tortures dans le but d’obtenir des informations, furent malheureusement nombreux bien avant le 17 octobre 196134.

LE REMÈDE : LA DÉSAFFILIATION

En contrepoint de la « repentance » promue par Jacques Chirac, Max Gallo montre son admiration pour « la stratégie mémorielle » du général de Gaulle35. Le souvenir de l’homme du 18 juin hante les pages de Max Gallo et semble l’influencer. Tout comme lui, il semble voir l’histoire du pays comme une suite de crises (ou de défaites fondatrices) et de désunions contrebalancées par la présence de chefs providentiels et unificateurs à la tête de l’État. Ainsi l’académicien cite-il en exergue du Dictionnaire amoureux… (p. 7) cet extrait des Mémoires de guerre de Charles de Gaulle :

Vieille France, accablée d’Histoire, meurtrie de guerres et de révolutions, allant et venant sans relâche de la grandeur au déclin, mais redressée de siècle en siècle, par le génie du renouveau36.

Ces éléments de langage faisaient partie de la rhétorique du candidat Sarkozy en 2007. Il s’agissait de montrer que ce sont les autres (les communautaristes, les repentants) qui sont les facteurs de la désunion, du désordre, du danger, de la « crise identitaire », mais aussi de tisser une filiation entre son camp et des figures providentielles tels que Jaurès et saint Louis, qui auraient été mues par le même désir patriotique rassembleur. C’est cette stratégie de « désafilliation » qui a permis à Nicolas Sarkozy de se parer du prestige de quelques « grands hommes » de gauche et de brouiller l’origine réelle et barrésienne de son discours37 Max Gallo la reproduit (et peut-être l’a-t-il inspiré au candidat de l’UMP en 2007) avec la discipline historique en s’affirmant l’héritier d’une histoire scientifique, critique, alors qu’il est plus certainement, sur la forme et dans le fond, le continuateur d’un récit national identitaire romanesque, mythifié et rétrograde. Plus qu’un roman national, l’académicien a créé un roman historiographique.

Ainsi place-t-il en exergue de son livre, avant le sommaire et l’introduction, trois citations. Si la première, d’Ernest Renan, ne surprendra personne, les deux suivantes sont pour le moins étonnante. Viens tout d’abord la citation archi-célèbre (et bien déformée) de Marc Bloch (dans L’Étrange défaite, 1940) dont Nicolas Sarkozy fera, en plein débat sur l’identité national, son miel.

Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France, ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération.

Cette citation est suivie d’une phrase de Jacques Bainville tirée de son Histoire de France (1924) :

Le peuple français est un composé. C’est mieux qu’une race, c’est une nation.

Nous avons déjà expliqué en d’autres occasions, et notamment dans les pages des Historiens de garde (p. 153-170), en quoi cette association était gênante. Comparer Marc Bloch, historien reconnu, juif, républicain de gauche et résistant à un journaliste (qui n’était en rien historien, pas au sens scientifique du terme) de l’Action française, antisémite et admirateur de Mussolini (ce que l’académicien ne précise jamais) permet non seulement de désaffilier Marc Bloch, en ne faisant plus de lui l’historien critique qu’il était, mais un promoteur d’une histoire nationaliste38, mais en sus de réhabiliter Bainville, au point d’en faire, en tant qu’historien, l’égal de Bloch. Max Gallo inaugure là une habitude qui sera prise par une partie des historiens de garde et des publications qui leurs sont proche. Les œuvres de Bainville, d’une bien piètre qualité, ont ainsi connu une renaissance éditoriale au cours du quinquennat Sarkozy. Le numéro 4 du Figaro Histoire en fera même l’un des grands historiens français, titre que rien, pas même le succès de son Histoire de France dans les années 1920, ne peut justifier, en le mettant sur la même page que… Marc Bloch39.

En laissant accroire que deux hommes que tout opposait, comme Bainville et Bloch, ont pu être mus par un même sentiment, Max Gallo défend en filigrane la thèse qui voudrait que la République (et les républicains) ne fasse que prolonger l’œuvre de la monarchie. Cette idée se trouve affirmé de manière évidente sur la couverture de L’Âme de la France, où l’on voit une statue allégorique de Marianne (en fait, une photo de la statue érigée place de la République, à Paris, de Léopold Morice fondue en 1883). En bas, à sa gauche, sont représentés deux symboles, une fleur de lys (premier dans le sens de la lecture) et un bonnet phrygien. Le propos est évidemment de dire que la nation (représentée par Marianne) découle d’abord de la monarchie puis de la république40.

On ne peut qu’être frappé par la ressemblance entre cette couverture et celle de la Petite Histoire de France de Jacques Bainville (1930) illustrée par Job. La figure féminine ne représente certes pas la République (que Bainville honnissait ; d’ailleurs, on remarque que l’allégorie cache à moitié le coq et la cocarde tricolore) mais sans doute une muse (Clio ?). Néanmoins, l’emplacement des trois symboles (également dans le sens de la lecture) représentant la monarchie, l’Empire, puis la République (fleur de lys – aigle impériale – coq gaulois41) obéit à la même idée de continuité des régimes (et de l’antériorité de l’Ancien régime, d’où découleraient les autres).

M. Gallo, "L'âme de la France" (2007). Couverture D. Thimonier // J. Bainville, "Petite Histoire de France" (1930). Couverture Job.
M. Gallo, L’Âme de la France (2007). Couverture D. Thimonier // J. Bainville, Petite Histoire de France (1930). Couverture Job.

La même remarque peut-être faite quant aux éditions de poche de L’Âme de la France (2009) en deux tomes. Le premier représente Louis XIV avec, en fond, des fleurs de lys. Le second, lui, montre une allégorie féminine devant un arrière plan de bonnet phrygien.

Les couvertures des éditions de poche de "L'âme de la France" de M. Gallo (2009).
Les couvertures des éditions de poche de L’âme de la France de M. Gallo (2009).

Mais revenons à Jacques Bainville, dont les travaux, et, au-delà, ceux de toute « l’école capétienne » sortie des rangs de l’Action française, semblent avoir eu une grande influence sur la manière qu’a Max Gallo d’envisager l’histoire, y compris dans ses méthodes42. Les historiens issus de ce mouvement refusaient d’appuyer leur récits historiques sur ce qu’ils appelaient les monuments (résultats de fouilles archéologiques, objets, bâtiments, mais aussi les documents comptables trouvés en archives) et leur préféraient les « témoignages », c’est-à-dire les mémoires et les chroniques écrites par les anciens. Celles-ci, d’ailleurs, ne devaient pas être soumises à la critique, mais acceptées comme telles. « Le fond de l’esprit critique, expliquait ainsi Dimier, quand il s’agit de l’histoire du passé, est de croire les Anciens »43. Max Gallo ne fait que reprendre à son compte ce programme en citant au premier degré, sans mise à distance, des œuvres de grands personnages, certain que leur autorité et leur renom appuieront ses propos. « L’Histoire n’était pas une science humaine, mais une autorité. » écrivait l’historien américain Stephen Wilson il y a quarante ans à propos de l’Action française44. Une citation qui irait comme un gant à Max Gallo.

Fin de la 1ère partie.

William Blanc

  1. Remercions au passage Nathalie Dalla Corte pour sa traduction et sa patience.
  2. Si on excepte le livre de Jean Sévillia, Historiquement correct. Pour en finir avec le passé unique, 2003, citons, dans l’ordre chronologique : Alain Minc, Une histoire de France, 2008. Lorànt Deutsch, Métronome, 2009. Dimitri Casali, L’Histoire de France interdite, 2010. Jean Sévillia, Historiquement incorrect, 2011. Mettons de côté les livres de Franck Ferrand et de Stéphane Bern, et leurs nombreuses productions audiovisuelles.
  3. Le Point, 14 juillet 2011.
  4. Dictionnaire amoureux... p. 196-197.
  5. Voir à ce titre cette analyse très pertinente du « féminisme » de Max Gallo.
  6. Dictionnaire amoureux…, p. 17. Souligné par nos soins. Max Gallo précise bien que La Chanson de Roland a été écrite au XIe siècle, mais ne semble pas faire la distinction entre la fiction épique et la chronique historique.
  7. Une analyse similaire avait déjà été proposée, mais dans un contexte bien différent : « À coup sûr Roland aime autant son pays que le plus sincère et le plus dévoué des volontaires de 1792. La France ! il n’a que ce mot à la bouche et cet amour au cœur, et voici quelques mots qui sont le résumé de son âme : « Terre de France, vous êtes un doux pays ! » Quand la France est en péril, il regarderait comme une honte de penser à tout autre être aimé, même à sa fiancée, même à la belle Aude. » (L. Gautier (éd.), La Chanson de Roland, édition critique, Alfred Mame et fils, 1872, p. XXI). Cette déclaration enflammée de Léon Gautier s’explique surtout par le contexte de la récente défait face à l’Allemagne en 1871. Max Gallo, lui, aurait dû faire preuve, en 2011, d’un peu plus de recul.
  8. Voir à ce sujet J-P Demoule, On a retrouvé l’histoire de France, Robert Laffont, 2012, p. 86-93, et le documentaire de J. Prieur, Vercingétorix, 1ère partie, 2005.
  9. Dictionnaire amoureux… p. 65.
  10. Interview parue dans Le Figaro, 5 septembre 2013
  11. Dictionnaire amoureux… p. 273. Article Lavisse
  12. L . de Cock, « Veut-on une histoire identitaire ? », Libération, 11 octobre 2010.
  13. L’Âme de la France, p. 16 et 22. Passage en gras souligné par nos soins.
  14. Un concept qui annonce celui de « crise identitaire » repris, notamment, par Stéphane Bern, au Monde le 5 novembre 2012, puis par Dimitri Casali le 7 janvier 2013 sur le site Atlantico.fr.
  15. Rappelons que Max Gallo a été un partisan du « non » au traité de Maastricht.
  16. L’âme de la France, p. 21-22.
  17. L’âme de la France, p. 20-23.
  18. « Puisque la France était une nation, l’étude de son origine devait en effet permettre de savoir quelles étaient exactement les qualités et les défauts de cette nation. » S. Venayre, Les Origines de la France, Seuil, 2013, p. 14.
  19. L’âme de la France, p. 20-23.
  20. Voir N. Offenstadt, « L’âme de la France au musée », Médiapart, 13 janvier 2009.
  21. Dans Fier d’être français, 2006. Voir aussi Histoires particulières, p. 90. H. Lemoine, « La maison de l’Histoire ». Rapport pour la création d’un centre de recherche et de collections permanentes dédié à l’histoire civile et militaire de la France, p. 6.
  22. H. Lemoine, « La maison de l’Histoire ». Rapport pour la création d’un centre de recherche et de collections permanentes dédié à l’histoire civile et militaire de la France, p. 14. Souligné par nous.
  23. É. de Montety, « Gallo rejoint les immortels », Le Figaro, 1er juillet 2008.
  24. C’est moins la cas pour L’âme de la France, écrit en 2006, avant les grands discours de N. Sarkozy sur l’histoire de France.
  25. Voir l’ouvrage collectif du CVUH, Comment Nicolas Sarkozy écrit l’histoire de France, Marseille, 2008, p. 10-11 et 14.
  26. L’âme de la France, p. 590
  27. Ibid., p. 590
  28. Voir, pour l’emploi de ce terme par le candidat Sarkozy et une courte bibliographie, Comment Nicolas Sarkozy écrit l’histoire de France, Marseille, 2008, p. 156-160.
  29. Voir Les Historiens de garde, p. 192-194
  30. Voir l’article du site Les Mots sont importants à ce sujet. Précisons d’emblée qu’accoler le terme de négationnisme à Max Gallo nous semble hors de propos.
  31. L’âme de la France, p. 527.
  32. Ibid., p. 516
  33. Dictionnaire amoureux… p. 330
  34. La bibliographie consacrée à cette événement est impressionnante. Citons simplement l’un des titres les plus récents : L. Amiri, La bataille de France : La guerre d’Algérie en métropole, Robert Laffont, 2004
  35. L’Âme de la France, p. 590.
  36. Sur la dialectique historique gaullienne, voir M. Agulhon, De Gaulle, Histoire, symbole, mythe, Paris, 2001, p. 35-42, notamment cette citation : « Ainsi l’histoire de France paraît-elle régie par une sorte de loi, évolution cyclique où la défaillance de l’État laisse remonter à la surface la vieille passion querelleuse, où la passion entraîne les désastres, où enfin du désastre surgit le chef qui refait l’autorité de l’État. » (p. 41-42).
  37. Comment Nicolas Sarkozy écrit l’histoire de France, Marseille, 2008, p. 17-20. Voir aussi l’exemple de Jaurès, p. 103-107.
  38. La citation de M. Bloch n’est d’ailleurs pas complète, et Max Gallo le sait pertinemment. Voici la phrase incluse dans son paragraphe d’origine : « Surtout, quelles qu’aient pu être les fautes des chefs, il y avait, dans cet élan des masses vers l’espoir d’un monde plus juste, une honnêteté touchante, à laquelle on s’étonne qu’aucun cœur bien placé ait pu rester insensible. Mais, combien de patrons, parmi ceux que j’ai rencontrés, ai-je trouvés capables, par exemple, de saisir ce qu’une grève de solidarité, même peu raisonnable, a de noblesse : « passe encore », disent-ils, « si les grévistes défendaient leurs propres salaires ». Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l’histoire de France, ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération. Peu importe l’orientation présente de leurs préférences. Leur imperméabilité aux plus beaux jaillissements de l’enthousiasme collectif suffit à les condamner. Dans le Front populaire — le vrai, celui des foules, non des politiciens — il revivait quelque chose de l’atmosphère du Champ de Mars, au grand soleil du 14 juillet 1790. » M. Bloch, L’Étrange défaite, p. 103-104 de l’édition électronique à laquelle nous nous référons.
  39. Nous renvoyons à notre article sur le site Aggiornamento.fr. Notons que Max Gallo croise fréquemment à l’antenne de Canal Académie, Christophe Dickès, journaliste à la même radio et éditeur… des travaux de Jacques Bainville
  40. Max Gallo a-t-il été impliqué dans la réalisation de cette couverture ? Nous n’en savons rien. Contentons-nous de dire que celle-ci épouse parfaitement le propos de l’académicien.
  41. Représentant la République, le coq est, notons-le, à moitié caché par Clio. Petit pied de nez du monarchiste Bainville au régime ?
  42. Pour une analyse de « l’école capétienne » de l’Action française, voir E. Weber, L’Action française, Fayard, 1985, p. 54-56, et 565-576, et, plus récemment, J. Prévotat, L’Action française, PUF, 2004, p. 20-24. Voir également notre intervention sur l’école de vulgarisation de l’Action française le 8 juin 2013 lors de la journée du CVUH « Vulgariser les savoirs historiques ». Pour une bibliographie un peu plus poussée, on se reportera également aux Historiens de garde, p. 245-246 (notes 193 à 209).
  43. Voir F. Hartog, Le XIXe siècle et l’histoire. Le cas Fustel de Coulanges, Seuil, Point, p. 190-191.
  44. S. Wilson, « Les Historiens d’Action française », Études maurrassiennes, 2, 1973, p. 195-202.